
Hong Kong: les députés pro-démocratie du Parlement annoncent leur démission collective
Tous les 15 députés pro-démocratie restants claquent la porte du Parlement local en signe de solidarité, et pour protester contre l’exclusion de quatre élus de leur camp. Le couperet était tombé quelques instants après le feu vert venu de Pékin : ces quatre députés perdent leur mandat avec effet immédiat et sans la moindre procédure judiciaire.
Leur tort : ils avaient appelé les États-Unis à sanctionner les autorités hong-kongaises, responsables, selon eux, de violations des droits de l’homme. Ces exclusions sont « constitutionnelles, légales, raisonnables et nécessaires », a estimé Carrie Lam, la cheffe de l’exécutif, toujours là pour prêter main forte à Pékin, déterminé à porter un coup fatal au mouvement pro-démocratie.
Ce mouvement est aujourd’hui au plus mal, suite à l’adoption d’une loi sur la sécurité nationale, qui criminalise la sécession, la subversion, le terrorisme et la collusion avec des forces extérieures, rappelle Heike Schmidt du service international de RFI. Cette loi permet aux autorités locales de disqualifier des élus considérés comme menaçant la sécurité nationale.
► À lire aussi : Le militant Tony Chung, premier accusé de «sécession» par un tribunal
Loin de se résigner, le désormais ex-député Dennis Kwok avait déclaré à la presse : « Si le respect des procédures, la protection des systèmes et la lutte pour la démocratie et les droits de l’homme entraînaient une exclusion, ce serait un honneur pour moi. »
Absence d'opposition au Conseil législatif
« Aujourd’hui est un jour triste pour Hong Kong mais c’est aussi un jour de gloire pour nous tous. Nous devons quitter nos postes. Cependant, il y aura d’autres Hong-Kongais qui prendront la relève avec les mêmes valeurs, les mêmes aspirations, le même espoir et je suis sûr qu’ils continueront à se battre pour les valeurs fondamentales de Hong Kong », explique Kenneth Leung, un des quatre députés disqualifiés par Pékin.
Après ces exclusions, en signe de protestation, tous les 15 députés pro-démocraties ont donc annoncé qu'ils démissionneraient à leur tour. Il y a quelques jours, ils avaient menacé de démissionner « en masse » en cas d'exclusion de leurs collègues. Les députés du camp pro-démocratie n’occupaient déjà plus que 19 des 70 sièges du Conseil législatif. Le Parlement local de Hong Kong se retrouve donc sans opposition.
La nouvelle « interprétation » de Pékin exige de tous les députés de Hong Kong d’être de « bons patriotes » chinois. Elle ferme donc la porte du Parlement à tout futur député prônant justement les valeurs de démocratie et de libertés fondamentales, rapporte notre correspondante locale, Florence de Changy.
Même certaines voix modérées du camp pro-Pékin ont estimé qu’il n’était « pas sain » pour la gouvernance de Hong Kong de ne plus avoir d’opposition au Parlement.
Its my honour having served as a HK legislator. I might not be given the same opp in the future. But I have faith the talented & courageous youth will help build our city for better. I love HK, this is a firm conviction that I will not yield to any new challenges now and ahead. pic.twitter.com/B8kyn1v2uT
— Alvin Yeung 楊岳橋 (@AlvinYeungnk) November 11, 2020
Les députés du camp démocrate ont bien fait de refuser de participer à cette mascarade, car il est évident que Pékin ne supporte plus l’existence d’une simple opposition. C’est pékin qui a décidé aujourd’hui de reprendre en main non seulement le gouvernement de Hong Kong mais aussi le Parlement et d’interdire toute forme d’opposition légale. Ce qui est extrêmement grave. Dans ces conditions, on se demande effectivement quelle serait l’utilité pour l’opposition de siéger… »
Jean-Philippe Béja, directeur de recherche émerite au CNRS spécialiste de la Chine (00'59")
Publié le 07/12/2020 - Modifié le 07/12/2020