
- Transcripción
Extrait de La Puce à l'oreille se fait une toile du 25 mai 2020
Pascal Paradou : Bonjour Lucie !
Lucie Bouteloup : Bonjour Pascal !
Pascal Paradou : Aujourd’hui, un film pas à piquer des hannetons…
Lucie Bouteloup : Un film pas à piquer des hannetons, c’est vrai. Un film qui témoigne à la fois d’une façon de parler typique, d’une époque, mais aussi d’un autre coin de France. Ouvrez grand vos feuilles, Pascal, le cours commence !
[Extrait du film Fric-Frac]
Marcel : J’ai du mal à comprendre ce qu’il dit. Il est français ?
Loulou : Pur-sang de La Villette. Moi, je suis de Barbès.
Marcel : Alors, tout ça, c’est de l’argot ?
Loulou : Vous avez mis le doigt dessus ! L’oseille, c’est le fric ; se faire la paire, c’est se débiner ; casser les pieds, c’est emmouscailler ; bonnir un truc, c’est jacter.
Marcel : Jacter ?
Loulou : Causer, quoi !
Marcel : C’est drôle, vous me traduisez de l’argot que je ne comprends pas en argot que je comprends.
Pascal Paradou : Alors, ça, c’est formidable, parce qu’on entend à la fois Fernandel et la grande Arletty.
Lucie Bouteloup : Eh oui, bravo, c’est bien Arletty et Fernandel qui jouent dans Fric-Frac, un film de 1939 réalisé par Claude Autant-Lara. Alors, Arletty campe le rôle de la môme aux côtés de Fernandel qui incarne un cave, et aussi de Michel Simon, celui d’un marcheur. Pour ceux qu’auraient pas tout compris, « la môme », c’est la jeune fille ; « le cave », c’est celui qui se fait arnaquer ; et « le marcheur », eh bien, c’est le cambrioleur. Pour l’histoire, vous l’aurez compris, le film est une comédie populaire. On y suit Marcel, un garçon d’un bon milieu mais très naïf, qui travaille dans une bijouterie. Le film met en scène sa rencontre avec deux personnages hauts en couleur : Joe, un marlou à la petite semaine, mais aussi la belle Loulou, qui va immédiatement faire chavirer le cœur du pauvre Marcel. Mais seulement, voilà, pendant que Marcel succombe aux charmes de Loulou, celle-ci en profite pour organiser dans son dos un fric-frac dans sa bijouterie.
Pascal Paradou : « Un fric frac », on sait bien ce que ça veut dire.
Lucie Bouteloup : Absolument, c’est bien ce que ça veut dire ! Ça désigne un cambriolage en argot des années 1930-1940. Alors, l’argot, dans le cinéma populaire, c’est une longue histoire, et on le retrouve beaucoup dans les films qui parlent des malfrats parce que la première fonction de l’argot, eh bien, c’est de coder le langage pour qu’il ne soit compris que par les gens du milieu, les initiés. Je pense par exemple à Du Rififi chez les hommes ou alors Touchez pas au Grisbi, Razzia sur la chnouf, Le Doulos, ou encore Le Cave se rebiffe. Dans Fric-Frac, on a affaire à du « titi parigot » pur jus. D’ailleurs, selon le dictionnaire Le Trésor de la langue française, eh bien, le mot « parigot » viendrait de la contraction de « Paris » et de « argot ». Et ce qu’il y a d’intéressant, dans ce film, je trouve, eh bien, c’est qu’il confronte différents registres de langage, avec tous les malentendus que ça peut provoquer. C’est justement là-dessus que repose l’humour du film.
- Léxico
Le cinéma : jouer ; réalisé/réalisée ; camper un rôle ; incarner ; une comédie populaire ; mettre en scène ; un personnage.
La langue : une façon de parler ; l'argot ; coder ; le langage ; le titi parigot ; une contraction ; un registre de langue ; un malentendu.
Les expressions d'argot : ne pas piquer des hannetons ; ouvrir ses feuilles ; l'oseille ; le fric ; se faire la paire ; se débiner ; casser les pieds ; emmouscailler ; bonnir un truc ; jacter ; causer ; un fric-frac ; une môme ; un cave ; un marcheur ; un marlou.