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Extrait de L’atelier des médias du 19 octobre 2019
Steven Jambot :
Bonjour Sheerazad Chekaik.Sheerazad Chekaik-Chaila :
Bonjour Steven.Steven Jambot :
Vous avez réalisé avec Antoine Schirer un projet intitulé Dans ton tel produit par Upian. On vient d’en entendre un extrait. Alors, le concept, ce sont des petites vidéos de 5 minutes, c’est bien cela ?...Sheerazad Chekaik-Chaila :
Oui…Steven Jambot :
Des interviews face caméra où l’interviewé regarde, nous regarde, nous spectateurs. Ce sont des jeunes qui ont 18 ans, ou autour de 18 ans et l’idée, c’est de savoir comment ils utilisent leur téléphone portable. Ils sont filmés en studio, ont leur téléphone à la main, celui qu’ils ont au quotidien et on les voit le manipuler. Et leur écran s’affiche en grand à l’image pour qu’on puisse le voir. Pouvez-vous nous expliquer d’où est partie cette idée en fait ?Sheerazad Chekaik-Chaila :
Mais il y a une longue réflexion derrière ça et c’est né d’abord de mon expérience en tant que journaliste et aussi en tant que journaliste qui intervient beaucoup dans des classes auprès de jeunes adultes ou adolescents. Et donc, très souvent j’entendais beaucoup de fantasmes, d’idées reçues sur la manière dont ces jeunes pouvaient utiliser leur téléphone et ce n’était pas du tout ce à quoi j’étais confronté moi quand je les rencontrais. J’avais l’impression de découvrir à chaque fois des nouvelles manières de s’informer, d’apprendre des nouvelles applis, de voir aussi des nouveaux chemins d’informations qui étaient très différents des miens. Et donc, c’était une découverte permanente et je me suis dit que ça pouvait être intéressant de le documenter un jour ou l’autre. Et Antoine, qui est donc le coréalisateur de cette série, avait au même moment que moi très envie de faire du documentaire. Et donc, on s’est retrouvés sur cette idée d’aller documenter ces pratiques.Et sur le programme en lui-même, l’idée de mettre à l’écran le téléphone a mis un petit peu de temps à germer mais une fois que c’est arrivé, c’est devenu une évidence parce qu’on s’est dit : « C’est vraiment une opportunité de plonger dans l’intimité ». Et en même temps, il y a donc, il y a un côté assez voyeur finalement dans ce programme et en même temps une forme de pudeur à les suivre, à comprendre un peu comment ils réfléchissent. Et puis, eux sont assez généreux aussi. Ils nous ont vraiment ouvert leur téléphone sans filtre. Du coup, c’était très très très enrichissant pour nous.
Steven Jambot :
On va y revenir justement. Essayons de recontextualiser. Ce projet il a vu le jour dans le cadre de ce qu’on appelle l’atelier de l’audiovisuel public. C’est une action conjointe des entreprises de l’audiovisuel public français dont RFI. Le thème, c’était « Ma vie sur les réseaux sociaux ». Et là, on se rend compte qu’on va un petit peu plus loin. On est dans la vie tout court.Sheerazad Chekaik-Chaila :
Oui, c’est assez vrai. En tous cas, nous, quand on a vu passer cet appel à projet, on l’a lu en se disant : « Mais on coche toutes les cases donc il faut qu’on y aille ! C’est tout fait, c’est tout pile pour le projet qu’on a dans la tête ! ». Donc, on y est allés comme ça et il se trouve qu’on a fait partie des projets retenus. Donc, on en était très contents, très fiers. Derrière, il y a eu encore une phase de travail qui a duré plusieurs mois. Et oui, c’est la vie tout court parce qu’on aborde effectivement un certain nombre d’usages et de pratiques mais au-delà des aspects techniques et des différentes applis qu’on peut voir défiler dans les téléphones de ces ados, on se rend d’abord compte qu’en fait, ce sont des jeunes qui se construisent et qui du coup réfléchissent au monde qui les entoure, se posent plein de questions, ont parfois envie d’agir et leur téléphone peut leur permettre un certain nombre de choses très concrètes dans leur vie du quotidien.Steven Jambot :
Alors, on a par exemple Meryem qui a 18 ans, qui construit son identité féminine notamment en consultant des comptes et des stories sur Instagram. On a aussi Héloïse, par exemple 17 ans qui veut être actrice du changement. Elle est profondément écolo, elle nous parle de la campagne « On est prêts » dont on recevait d’ailleurs l’organisatrice la semaine dernière dans L’atelier des médias. Elle consomme autrement, achète ses habitsou vend ses livres autrement. Quand elle va dans un supermarché, elle utilise une application comme Yuca pour scanner les codes-barres et voir si c’est bon ou mauvais pour la santé. Oui, c‘est la vie au global et il y a en fait autant d’usages du smartphone que de jeunes, en fait. Là, on a eu huit portraits et chacun a des choses à nous apprendre, des choses à nous montrer.